Le problème des émissions politiques actuelles en télévision ? Elles sont tenues et/ou animées par des générations Y, sans culture historique, ou tout du moins sans réflexe de penser à l’utiliser. Toutes et tous voit le monde… comme commençant avec leur génération et leur brillance. Ainsi des commémorations relatives à Jacques Chirac actuellement, et des billets des éditorialistes (plus vieux eux souvent) par facilité. En presse écrite, c’est un peu mieux, et si le HuffPost souligne bien qu' »imiter Chirac était un sport national« , il manque quand même quelques références dans le récapitulatif. Chirac, un bon client de tous comiques depuis ses débuts en politique ? Yves Lecoq (je vous en reparle plus bas) le dit à BFM (repris par Voici), « Quand je voyais le texte arrivé, c’était, ça y est, il y a Chirac, on va rigoler ».

Un abonné des imitateurs des 80’s
Pour aborder l’ancien président, on souligne son côté populaire et cool, marqué par la caricature et l’imitation. Et avant tout sa marionnette aux Guignols de l’Info. Ce comme si c’eut été la seule rigolade produite à son endroit tout au long de sa carrière. C’est oublier toute une évolution le concernant, et qui avait commencé tôt. Dès les années 70/80, avec Patrick Sébastien. Celui-ci était alors un peu moins animateur télé, et davantage comique de scène, et n’hésitait pas à brocarder le personnage public, surtout en distributeur de baffes à destination du personnel politique de l’époque avec qui il était en interaction. Le sketch ci-dessous illustre le goût du comique pour le cabaret, avec la petite ritournelle en chanson détournée, qui enfonce chaque moquerie. Je me souviens que ses sketchs accompagnaient souvent les repas du week-end en famille, faisant pouffer toute la tablée.
Moins fréquent dans la mémoire en volume, il y avait aussi les imitations de Thierry Le Luron, jouant tant sur la voix que le physique, en s’affublant des symboles distinctif évidents : front dégagé, lunettes à épaisse monture et écharpe tricolore. Une posture guindée, presque coincée que perdra totalement la future marionnette guignolesque, mais qui témoignait aussi de l’évolution du personnage réel. Et ce même si c’est surtout les imitations de VGE (notamment cette fausse interview avec le regretté Pierre Desproges), qui auront marqué la mémoire bidonnante populaire. Et puis un petit peu plus rare, on retrouve l’inattendue imitation d’Eric Blanc, par exemple en une situation toute aussi surprenante que festive. Il fallait un peu d’effort d’imagination, au-delà du même masque frontal usité par Pat’ Séb’…
Première marionnette… animalière
Et ça ne s’était pas arrêté à cela. Quelques années plus tard, sa première vraie marionnette, fut celle… du Bébête Show. Emission satyrique de Jean Amadou, Stéphane Collaro et Jean Roucas sur TF1, où le personnage d’oiseau de proie, de charognard en fait, n’était pas très physiquement à son avantage… ni à la fin des textes tenant plus du comique de chansonnier un peu désuet, qui ont fini par lasser. Mais ceci valant pour l’ensemble du bestiaire. Reste que là, l’inspiration du Muppet Show avait véritablement commencé à l’installer dans une popularité à spectre large : parlant tant aux enfants qu’aux adultes et aux grands-parents, en ouverture de la grande messe du journal TV, où l’on retrouvait… le vrai Chirac dans l’actu chaude ! La boucle était bouclée.
Les doublures vocales tout terrain
Enfin, si l’on parle beaucoup de Bruno Gaccio, un des auteurs des Guignols de Canal, à qui on demande son avis sur la question, il ne faudrait pas oublier celui qui fut… la voix officielle de Chirac toutes ces années durant : Yves Lecoq. Qui d’ailleurs lui-même l’avait incarné sur scène quelques années plus tôt… et encore plus récemment. Mais il s’était quelque peu effacé dans ce travail « visuel », pour surtout vocaliser la marionnette de Chirac aux Guignols, ou en radio aussi, dans ses accents sans doute les plus marrants à date, tout à la fois bourrés de ses tics vocaux et portés par des auteurs au vitriol.
Seul le HuffPost a pensé à aller voir un peu ailleurs que dans le pré carré du show business, et à remonter notamment les imitations… des politiques eux-mêmes ! Hé oui, Chirac faisait même marrer ses collègues et comparses professionnels, un cas unique. Sélection où il semble que Pierre Moscovici (bravo à lui) tienne largement la dragée à ses collègues, au point de se faire surnommer « Mosco-chichi » et excepté peut-être Bruno Le Maire ! Une reconversion possible pour les meilleurs d’entre eux ?
Plus proche de nous, et en audio, c’est aussi le succès indéniable de Gérald Dahan, dans un canular téléphonique qui a fait croire aux Bleus (et à notre Zizou national) que le Président Chirac lui demandait personnellement une faveur lié à l’hymne national ! Un moment de rigolade pure et une démonstration des qualités d’imitateur indéniables de Dahan… au niveau duquel on peut presque parler cette fois de sosie vocal ! Période temporelle où compte aussi les imitations de Laurent Gerra, surtout sur scènes.
Un constat final: Chirac est sans doute l’un des politiques ayant la plus belle permanence aux rayons des imitations et marionnettes, à l’instar d’un VGE, Mitterrand ou encore à moindre niveau de rang des Juppé, Barre, Rocard… Rien de surprenant ici: cela suit tout simplement le renouvellement des générations en politique (de tradition assez lent, ces messieurs voulant garder longtemps la place, qu’on dit bonne) et la disparition de certains programmes et contenus dans les médias. Question qui se pose pour les Guignols et qui touchera peut-être d’autres anciennes émissions : aura t-on un jour le besoin de réanimer ces programmes au goût vintage, pour retrouver, faire renaître avec plaisir nos chers disparus parmi les people ?
Pour prendre un peu de hauteur et de dérision qui n’aurait pas déplu à Chirac lui-même… peut-être réfléchir à cette info pointant la vente sur Le Bon Coin ces jours-ci… d’une des marionnettes à l’effigie de l’ancien président ! Business is business.