La journée type du journaliste en 2013 (partie 1)

Capture d’écran 2013-06-26 à 22.58.29Je reprends l’exercice d’un confrère de Télérama, il y a quelques années, qui avait déroulé la logique totale d’une journée entière passée avec les marques et services du groupe Vivendi. Prenons une autre forme d’asservissement, ou plutôt de lente dérive. Celle liée aux technologies, aux services en ligne et aux réseaux sociaux. Exemple d’une journée type d’un journaliste type de moins de 30 ans, aujourd’hui… Ou plutôt d’un producteur de contenus.

Toute ressemblance avec des situations vues, entendues ou vécues étant purement fortuites et involontaires et… etc, etc.

  • 6h30 : j’aimerais dormir encore un peu plus mais c’est plus fort que moi. Le vibreur de mon téléphone m’indique que des interactions se produisent sur mes réseaux sociaux favoris et j’ai l’ouïe fine. Je sais ce qui vient de Twitter, ce qui vient de Facebook… C’est pratique, je n’ai plus besoin de programmer le réveil matin ainsi
  • 7h : poser mon smartphone sur le meuble dans la salle de bains, le temps de me doucher, m’emmerde littéralement. On a pas encore inventé la tablette étanche encastrable dans la faience, fuck ! Ou bien le pommeau à mini écran tactile ? Je balance un tweet en DM aux responsables com’ de quelques fabricants que je connais dans mon réseau, on sait jamais.
  • 7h15 : petit déjeuner fissa (j’ai commandé mes courses en ligne sur un drive hier soir, ouf), je lis les infos essentielles via mes applis de veille… une première idée d’article me vient, suite à plusieurs photos de particuliers s’étant shootés avec un poulpe sur la tête. Ca fait un buzz d’enfer… Bon je tweete le truc pour tester l’idée, voire si ça prend. Je lis la note Wikipedia sur le poulpe, des fois qu’il y ait des détails dégueulasses à tweeter en mode teasing.
  • 7h20 : j’ai quand même eu le temps de faire deux brèves dans la foulée, et n’ai pas oublié de « checker » sur Foursquare. Je suis Mayor de ma rue depuis un mois non stop ! Faudrait que j’exploite ça non ?
  • 7h25 : idée confirmée par les stats du site d’information où je bosse ce matin pour un CDD d’un mois. Les articles pushés dans la nuit (avec l’équipe de rédacteurs travaillant depuis l’Inde) ont bien fonctionné et dégagé la thématique des collections de mode printemps-été. Mais ce sont les vidéos de starlettes du Festival de Cannes à poil qui ont le plus fort taux de progression de V.U en fin de nuit…
  • 7h30 : je pré-rédige la trame de ma note de blogs, en piochant quelques idées de twittos qui ont percuté à mes tweets test lancés y’a une demie heure. Je leur fait un RT, ça suffira comme merci. Ceux qui m’ont followé dans le même mouvement… je zieute leur Klout. Si il est fort, je les suis, ça pourra être utile.
  • 7h45 : dans le bus, j’échange avec Jean-Paul le web-designer du site, pour qu’il prépare une page spéciale « mode, la tendance c’est nue et un poulpe en coiffure ». Il récupère des photos libres de droit sur Flickr, et fait chauffer la retouche d’images pour les transformer un peu, être sûr qu’on nous emmerde pas. Je balance quelques « like » aléatoires sur Facebook, ça peut toujours me ramener des « amis »…
  • 7h50 : J-P me shoote un SMS, il n’a pas de photos de poulpe et de fille nue vraiment top… et surtout rien en vidéo. Qu’à cela ne tienne, en sortant du bus j’ai repéré une affiche top sexy dans une vitrine de pharmacie. Je la filme avec mon smartphone sous Vine et shoote des photos. Je les mets sur Instagram et sur mon Tumblr, pour faire chauffer le buzz, et Jean-Paul les récupère dessus. Il fera un mix du tout. Il se démerde et il a intérêt à ce que ça claque. Sinon je dis au patron que je peux faire aussi bien que lui !
  • 7h55 : dans l’ascenseur, je croise la fille de la RH, qui me dit qu’elle me followe et m’a envoyé une invite sur LinkedIn. Elle aimerait bien qu’on échange, si jamais des gens dans mon réseau seraient intéressés par d’autres postes en CDD et interim, pour le service pub et l’informatique. Je lui dis pour déconner que je prends 10%, lol. Accessoirement, je fais un tweet #RH ironique pour me défouler. Mais sans les noms, elle pourra rien dire la conne.
  • 8h00 : je vais sur Facebook pour me détendre un peu autour de mon énième café, et je repère que le buzz part sur un délire de clients d’Apple aux USA qui ont monté une class action. Contre les produits high tech polluants ? Non, contre les files d’attente trop longues lors des sorties des produits de la marque à la Pomme… Ils réclament 15 milliards de dollars !
  • 8h05 : je fais une brève fissa pour les pages éco-bourse, car le titre Apple dérouille sur les marchés. Trois lignes de blabla avec les mots clés SEO (j’ai checké sur Google), 2 chiffres pompés sur Yahoo Finances, un visuel copié sur un blog… Le service marketing/pub me phone, ils ont noté la fièvre d’audience sur la rubrique high tech et les mots clés autour d’Apple et de Mac. Une opé spé’ a été vendue à un consortium de concurrents pour promouvoir leur politique de relation client. On change tout, à la poub’ le sujet starlettes et poulpe. On passe à un dossier techno « ils n’aiment plus la Pomme »
  • 8h15 : une alerte de mon calendrier m’indique que c’est le début de la conférence de rédaction ce matin… ah non, erreur. J’avais oublié d’annuler cette série d’alertes automatiques. Y’a plus de rédacteur en chef depuis 6 mois. Le business site manager qui l’a remplacé balance plutôt des tableaux de KPI et benchmark de la concurrence…

(to be continued & augmented)

8 réflexions sur “La journée type du journaliste en 2013 (partie 1)

    1. Tout dépend de la personne et de l’intention 😉 Mais oui, la continuité de connexion est telle qu’on ne peut échapper à rien ni personne.

  1. Une solution (parmi tant d’autres) pour régler ce problème: viens t’installer en Asie de l’Est (Chine) ou aux USA (Coté Pacifique). Tu auras entre 6 et 7 heures d’avance sur l’actu du matin et tu pourras lancer tous les papiers sans souffrir au réveil. Evidemment, la note de frais téléphonique de tes interlocuteurs va monter, mais c’est leur problème.

    1. C’est une idée, pour monter des équipes de rédaction. Cela dit, c’est un peu ce qui se tente, depuis les pays à bas coûts de production… Je pense que cet argument financier pèse même au-dessus de celui des fuseaux horaires.

    1. Hello Yep. Brassage de vent, pour le sujet de fond ? Ou pour la forme par laquelle j’en parle ? Ou voire pour les deux ?

  2. JE crois surtout qu’en ce moment on se focalise énormément sur le forme et la multiplicité des outils sans revoir le fond.

Répondre à yep Annuler la réponse.